Nous restons sagement dans notre périmètre d’un kilomètre autour de notre domicile…mais notre imagination, elle, s’envole vers les forêts enneigées grâce à Colette Laville-Dereau. Notre INTERLUDE de magie continue…

Prêtez-moi vos oreilles.
Là-bas, au fond de la forêt, par les nuits de pleine lune, il se passe des choses magiques.
C’est l’hiver, la neige recouvre tout le paysage, pas un bruit. Seul parfois un corbeau perce le silence de son « croa-croa ».
La forêt est là, magnifique avec la neige. Des milliers de cristaux scintillent le long des branches des sapins. Tout est feutré, ouaté.
Puis la nuit descend. Les étoiles s’allument dans le ciel de neige, semblables à des flocons qui seraient restés collés au ciel couleur marine. La lune se lève, monte tout doucement au-dessus des arbres, elle aussi entourée d’un halo cotonneux. Elle est ronde, pleine et elle brille, suspendue au-dessus de la forêt.
Soudain, une ombre se détache, rampe sur le sol. Quelle est cette ombre ?  Un animal ?  A-t-il des pattes ? Car cette ombre s’enfonce dans la neige souple, douce, profonde. L’ombre avance doucement. Elle avance…avance…sort de la futaie prudemment, s’arrête, écoute. Pas un bruit, alors elle peut continuer…et elle continue. Qui est-elle ? Où va-t-elle ? Elle avance toujours…avance…avance…avance…sûre d’elle, comme si elle avait un rendez-vous fixé d’avance. La lune brille…la lune éclaire la clairière où la bête –car s’en est une- vient d’arriver.

Là, commence la magie, le rêve. L’ombre n’est plus une ombre, mais un loup, un loup magnifique, un loup qui semble bleu dans la lueur de la nuit.
Aucun vent. Et pourtant c’est comme un bruissement, un murmure, une musique. Oui, c’est une musique.
Un piano joue quelque part dans cette forêt enchantée. Les premiers accords d’une valse lente se font entendre et le Loup Bleu, magnifique, s’élance, tourne, tourne, s’arrête, repart, sur le temps tantôt lent, tantôt rapide. Le Loup Bleu danse, caressé par les rayons de lune.
Puis, quand les étoiles s’éteignent une à une, comme dans une salle de bal, quand la lune, comme un chef d’orchestre, laisse la place au jour, quand le coq annonce une nouvelle journée, la forêt enchantée redevient calme, feutrée, ouatée sous la neige. Les cristaux scintillent sur les sapins comme des guirlandes oubliées de la nuit.
Personne ne peut soupçonner ce qui se passe les nuits d’hiver, les nuits de pleine lune.
Moi je sais. Et moi seule en ouvrant la fenêtre de ma chambre entend au loin une valse lente et imagine le Loup Bleu qui tourne, tourne, emporté par la mélodie de piano.

Pourtant…pourtant, lorsque vous vous allez vous promener en forêt, écoutez…écoutez prêtez vos oreilles au vent comme vous venez de me les prêter et je suis certaine que vous aussi vous entendrez la valse lente du Loup Bleu et vous laisserez emporter par la magie d’un tel instant.

 

Colette Laville-Dereau

 

Ce conte a reçu la Médaille d’Or à Pleneuf-Val-André (Bretagne) en 2006 et aussi le Grand Prix du Conte de Biscarosse en 2012

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